Le 4ème album de Slipknot se pose un peu là comme blockbuster : sorti voici à peine trois semaines, « All Hope Is Gone » s’affiche depuis lors en tête des charts mondiaux. « Sans l’aide des radios ou des télés », se plaît à préciser l’antenne française de Roadrunner, l’heureux label d’un groupe qui n’a nul besoin de ces médias obsolètes pour cartonner: 8 millions d’internautes se sont précipités en moins de 24 heures sur le web pour y découvrir les nouveaux masques des neuf américains de Des Moines, Iowa.
Le folklore façon plouc qui-serait-devenu-serial-killer-s’il-n’était-musicien a toujours été un élément important du succès de Slipknot, mais l’essentiel est ailleurs : au-delà des effets spéciaux spectaculaires, les Grimés ont appris à organiser leur chaos et signent désormais des chansons simultanément catchy et tétanisantes comme le cisaillant mais irrésistible « Psychosocial » et ses paroles d’époque : « On est niqués !/Chuis pas l’seul à l’penser ! ».
Le son d’ensemble a l’impact d’une massue et la précision d’un bistouri ; les deux guitaristes Jim Root et Mick Thompson font preuve d’une inédite virtuosité bluffante ; les drums sidérurgiques confèrent un élégant cachet indus’ aux chansons. Et le chanteur Corey Taylor évoque le fantôme de Layne Staley (Alice In Chains, ces jours-ci ressuscitée) dans « Gehenna », où il relate des bribes d’histoire perso: il a essayé de se conformer, en vain. Il s’est donc résolu, pour échapper à un pénible sentiment d’aliénation, à se chercher des camarades pareillement « inadaptés ». A ce jour, il en a trouvé bien plus que 8 : Slipknot a vendu 5 millions d’albums au total, et c’est loin d’être fini.